Décris-nous ta relation avec tes parents : Pas de mère, pas de père, aucun repère pour le gosse lunatique. Partis, morts. Un accident, scène morbide dont il ne garde aucune trace dans son esprit. Il y a juste la vieille peau qui l'a élevé plus comme une corvée qu'autre chose. Trop occupée à se préoccuper de sa personne pour avoir une minute de son temps à lui accorder. Education foireuse, inexistante, le gosse s'est fabriqué, s'est modelé. Les parents. Ça n'a aucun sens les parents. Un père, une mère. Deux êtres qui s'aiment, mais qui finissent par se détester. Tragique. La vie est tragique, n'a aucun sens sinon de faire chier les quelques êtres qu'elle abrite au creux de son sein suintant le poison comme s'il s'agissait du plus pur des laits. Bois mon enfant, la vie dit, la vie ordonne et le petit con grandit sans famille, oublie les réflexions de la grand mère grincheuse trop botoxée pour réellement savoir ce qu'elle souhaite exprimer. Il rit le gosse. Il rit l'orphelin. La vie ne vaut pas la peine d'être vécue. Il n'est rien d'autre qu'un déchet. Un de plus. Un sur six milliards. Faible, une larve, il abdique sans combattre. Le gosse rit et reste dans son monde d'encres et d'aiguilles, loin de tout, loin d'elle, loin d'eux. De lui. Le dermographe chante, se heurte contre la peau et la meurtrie. Le noir et les couleurs pénètrent dans la chair meurtrie et lui ne pense pas à la douleur. Un père. Une mère. Assez de douleur pour une vie entière que de ne pas être comme les autres gosses de riches, entouré de luxe, mais surtout de ses parents. Ils sont où tes parents Anton ? Six pieds sous terre. Loin de toi à jamais. // Comment ça se passe au lycée ? : Prison de l'esprit, le corps qui se lasse, qui se tend par l'ennui. Il ne pense pas là-bas, il ne regarde que l'horloge tourner alors qu'il dort d'un demi-sommeil. Le lycée n'a aucun intérêt, personne ne regarde ses notes, les profs se plaignent du système, les autres élèves sont trop occupés à se regarder le nombril, à faire dépasser les strings, à allumer, à se brûler. Prison. Il n'y a qu'elle qui ressort. La muette au prénom de garçon. Sa voix sont ses yeux, son regard qui transmet les choses. Un jour peut-être qu'il entendra un son différent. Différent il parle pour elle, fume pour elle, baise avec elle. Entre deux heures de colles, entre deux heures séchées il se retrouve avec elle. En marge, comme toujours, loin des autres. Il s'évade de l'établissement et la tatoue dans un coin dégueulasse. Elle. Brouillon vivant, elle lui rend la douleur, le fait saigner aussi. Le lycée c'est de la connerie et maintenant c'est fini. Loin des couloirs, sans diplôme, il erre, artiste de la peau. Il y retourne parfois. Juste pour la voir. Surtout pour l'emmener. Elle la muette violente imprégnée de son encre.