Décris-nous ta relation avec tes parents : j’aime bien ma mère. elle est belle. j’ai ses lèvres. j’aurais aimé avoir ses yeux (bleus) au lieu des miens (marrons comme merde sur trottoir). elle sourit tout le temps. et le dimanche, elle danse avec les rayons du soleil, j’te jure, sur du frank sinatra, genre elle ouvre les rideaux et fait une référence au soleil (elle l’invite) et puis c’est comme une valse à milles astres. fly me to the moon and let me play among the stars, qu’il chante. c’est sur ça qu’elle danse. ma mère. (belle belle belle) mon père, c’est pas lui qui l’embrasserait sur la lune (il a pas une gueule d’astronaute). c’est plutôt du genre à pas oser changer de ligne de bus pour rentrer parce qu’il a peur. pas vraiment un aventurier papa. pas vraiment un chevalier. je l’imagine pas inviter le soleil. il a un gros bide en plus. j’appelle le bide-pratique. parce que quand il est affalé sur le canapé à regarder des mecs devenir millionnaires il peut y poser sa bière/ses chips/sa sauce/ses espoirs/ses rêves. 
pratique. // Comment ça se passe au lycée ? : ça se passe bien. j'ai des notes "à mille dollars". je vais avoir une bourse aussi (c'est beaucoup d'argent pour me féliciter d'avoir aussi bien travailler. papa dit que ce sera comme "mon premier salaire") et puis j'ai beaucoup d'amis. on se retourne pour me faire des sourires dans les couloirs. j'aime bien ça. je suis "un brave gars", délégué de classe etc... j'en suis fière, faut pas croire le contraire. mais c'est pas le plus important. parce que quand on se retourne sur moi dans le couloir, ça fait juste un peu chaud au cœur, c'est des anonymes, je vais oublier leur nom en obtenant mon diplôme, ils vont oublier le mien aussi. au lycée, le seul sourire qui compte, c'est celui de ringo. c'est avec lui que je traine pendant les pauses déjeuner, c'est lui qui m'accompagne travailler à la librairie (enfin il met ses écouteurs et s'allonge sur mon épaule mais s'il était pas là j'y arriverai pas, c'est un peu comme un fard ou un château fort. les battements de son cœur/le rythme de sa respiration, c'est les comètes sur lesquelles je me frappe pour avancer). quand je partirai pour l'université, y restera que ringo dans mes bagages