on va on viens,
on coule, on laisse l'oxygène s'envoler,
on laisse notre cage thoracique s'écraser, souffrir, gueuler,
jusqu'à craquer et remonter à la surface.
on arrive au dernier moment à remonter la tête, passer,
casser la fine couche de volonté entre le noir profond et le bleu d'été.

moi c'est mon corps vif mais las, chaud mais froid,
qui foule le bitume en un rythme saccadé.
moi c'est mon esprit anarchiste mais romantique,
qui attrape le fil rouge pour pas s'égarer.

et je le cherche du regard, tenant du bout des doigts
ce besoin obsessionnel de me calmer entre tes bras.
et je le trouve, mon sourire face à toi est pur,
parce que ton âme en moi,
parce que toi,
parce que moi.
nous.

alors je m'approche et délicatement, vole sa cigarette
et la glisse entre mes lèvres bleutés.
alors je m'approche et délicatement, prend place entre ses jambes, m'adossant à lui comme on s'accroche dans ses bras.
j'suis en retard, désolée.

la musique en fond.
une mélodie que tu connais sans pour autant reconnaître.
le bruit des roues sur le bitume.
tu te laisses bercer.
tic tac. tic tac.
le temps passe mais toi tu le vois passer.
tes ronds de fumée se dissolvent dans le vent.
beauté éphémère.
votre fil se tend.
il étincelle à mesure qu'elle se rapproche
que tu relèves les yeux
et que tu la découvres, elle.
tu t'y accroches comme tu peux à ce sourire.
tu t'y accroches pour pas couler. pour pas le perdre.
le vol c'est mal.
tu lui réponds quand elle kidnappe ta clope.
s'excuser pour quoi déjà ? son retard ?
un vrai miracle si elle arrivait à l'heure.
dire pardon ne change jamais rien de toute façon.
t'es là maintenant, c'est tout ce qui compte.
tu passes une main dans ses boucles,
des fils d'or qui glissent entre tes doigts.
t'as pas l'esprit tranquille.
une affirmation, pas une question.
tu la laisses décider de tout déballer sur le tapis ou pas.
tu la laisses jeter les dés.
tu t'en fous que vous parliez de ça. d'autre chose.
ou de rien du tout.
tant qu'elle est là, tu te sens capable de tout.

Spoiler:

Le temps passe,
efface les pourquoi-ci, pourquoi-ça,
le temps passe,
écorche nos vie, panse nos âmes.

Un sourire au son de ta voix.
quoi qu'elle dise, elle sera vermeille pour moi.
La fumée s'évapore autour de moi et comme d'habitude,
je la regarde m'échapper du bout des doigts.
pourquoi elle à le droit, elle, de s'barrer comme elle l'entend,
pourquoi elle peut elle, fuir sans être humiliée.

Je ferme les yeux a son toucher, je ferme les yeux à sa voix,
comme si un petit bout de moi s'envole pour laisser place à l'autre.
anarchie casse toi.

l'arrière de ma tête rencontre son épaule et sa clope rejoint ses lèvres,
ma main attrape la sienne et comme le fil rouge lient vos doigts,
sa voix rencontre mon coeur, la mienne rencontre un mur.

Ocean de glace et de feu en barrière près de mes lèvres
anarchie, casse toi, laisse moi parler putain.

j'me suis encore tabassée avec cal.
j'me suis encore écorché avec gab.
j'me suis encore enfuie et l'autre conne m'as frappée elle aussi.

alors je lève les yeux vers son visage,
alors je me plonge dans son océan de mirage,
alors je lâche pas sa main, je la sert comme si,
comme si c'était la seule chose qui me maintenait encore en vie.

ton regard se perd sur vos doigts emmêlés,
sur ce fil rouge emmêlé lui aussi.
tu récupères ce petit bout de cancer.
tu laisses sa fumée te massacrer les poumons un peu plus.
les poumons, mais pas le cœur hein.
celui là, tu le laisseras pas se détruire.
elle non plus, tu la laisseras pas sombrer. tu lui interdis.
tu la maintiens la tête hors de l'eau.
et vous essayez de rester à la surface.
la prochaine fois qu'ils te retouchent, tu viens me voir.
tu vois rouge. ta voix perd de sa chaleur.
mais toi tu te consumes de l'intérieur,
comme la clope glissée entre tes lèvres.
tu deviens feu, elle est belle la flamme qui t'envahit.
elle te réchauffe de l'intérieur, elle finit par te brûler.
elle accroît toutes tes émotions. la haine. la colère.  
la douceur dans ses mouvements, ça te calme. ça t'apaise.
pas assez, pour que le grain de ta voix redevienne normal.
t'as qu'un mot à dire, tu le sais ça ?
qu'un mot à dire pour que tu joues des poings.
parce que t'es comme ça toi. trop protecteur pour regarder,
pour laisser faire. alors tu frappes, tu joues avec les mots.
tu veux pas être le mouton, tu veux être le loup.

sa voix change, son corps se tend,
et moi, moi je souris parce que pour une fois,
pour quelqu'un je suis importante.
sa voix change, ses mots sont durs,
et moi, je glisse un peu plus profondément
mes doigts entre les siens, me colle un peu plus à lui.
partage ma chaleur, partage ma peine.
je sais.
et je tend le cou pour embrasser sa mâchoire,
si douce et si carré.
et je souris, moi l'anarchie.
et je ferme les yeux,
j'laisse son parfum imprégner mes sens,
j'laisse sa chaleur partager la mienne,
j'me laisse aller, moi l'anarchie,
contre un océan de sentiments.

Spoiler: