Regarder le soleil sans détourner les yeux et brûler vif. - (A)sa

Invité

asa, prescott

dix-sept ans
dylan forsberg

« Aux innocents les mains pleines. » PALT

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Décris-nous ta relation avec tes parents : Madame est partie lorsque Petit Fiston était un jeune enfant. Innocent. Ignorant. Monsieur pleure mais les larmes ne coulent plus. Elles se sont taries il y a bien longtemps. Il est chagrin mais les sanglots se meurent à l'intérieur. Ils ont séché lorsque la tempête a tout enlevé. Pire que le départ de Madame, le départ du Grand Fiston. C'était un départ sans retour. Celui-là a tout emporté avec lui. Les sourires, les Noëls, les larmes aussi. Il n'y en avait plus assez. Alors Monsieur se repaît dans la monotonie d'une vie de silence et sans aucun goût ni aucune couleur. Il mange fade, boit sec et travaille dur. Le soir, quand Monsieur rentre, il ne s'intéresse plus à Petit Fiston. Il ne lui dit pas bonjour, ne l'interroge plus sur sa vie. Il ne parle qu'à sa télévision, qu'aux bouteilles de whisky qu'il vide lentement. A ses clopes qu'il préfère enchaîner. Le fantôme d'un père, le spectre d'une famille. Mais Petit Fiston est content : il n'a pas de bleus à cacher, de coupures à panser. Son père vit dans une pièce où il n'a pas le droit d'entrer. C'est simplement ça, rien de violent, rien de blessant. Mais il a quand même mal, un peu. C'est dedans que Petit Fiston sent que ça le brûle. Juste un vide intersidéral à la place du cœur. Un cœur qui ne donne ni ne reçoit d'amour. Les locataires sont partis. La famille s'est enfuie. Engloutie, évanouie, anéantie. // Comment ça se passe au lycée ? : Le lycée grouille de monde. C'est un terrarium de petites bêtes où la loi du plus fort règne tacitement. Tout le monde le sait, personne le dit, Petit Fiston l'a bien compris. Ne pas être trop visible ni trop invisible. Juste ce qu'il faut pour qu'on le laisse tranquille. Il ne veut pas d'ennuis. Alors il se laisse fondre dans la masse. Son corps se transforme et il devient la moyenne. La moyenne de tout, partout, tout le temps. Jamais en haut, jamais en bas, toujours au milieu. Il a compris qui regarder quand tout va bien, derrière qui se cacher quand tout va mal. Et il survit sans mal, Petit Fiston. Sa stratégie paie, il se sent protégé. De toute façon, il ne veut qu'une chose : survivre assez longtemps pour partir. Loin, sans regard en arrière, longtemps. Pour toujours ? Peut-être bien. Bientôt, il partira Petit Fiston. Ici, il n'a rien à perdre, ni rien à gagner. Ou presque rien. Zozio est là. Il illumine ma cour de récré, rayonne dans la salle de classe. Il brille de mille feux, comme un soleil, ou un feu d'artifice. Plutôt comme un feu d'artifice. Parce qu'il a fait boom en plein ciel et que ses cendres se répandent sur ses mains. Mais Petit Fiston se fiche bien que les ailes de Zozio soient brisées. Il ira à nouveau se cramer les rétines, comme avant, comme après. Toujours. Parce que Zozio, c'est son ami. C'est bien tout ce que Petit Fiston peut avoir. Un ami comme Zozio, c'est tellement mieux que des millions d'amis différents. Il aime Zozio. C'est la seule personne à remplir son cœur.

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Les cris étouffés. Les râles d'un plaisir à sens-unique. La position des mains. Les larmes silencieuses. Les gouttes de sueur fallacieuses.
Il se rappelle de tout. En détail, qu'on lui mélange les pièces et il saura reconstituer le puzzle. Il aimerait oublier mais les images sont imprimées dans sa mémoire, les sons gravés à tout jamais dans sa peau.
Il était là, il n'a rien fait. Il s'est contenter de regarder. Puis de parler quand on le lui a demandé.

Les gens le regardent, le fixent, le dévisagent. Les robes blanches et noires, les civils gênés. Témoin, ses yeux sont une preuve. Il doit raconter. Les souvenirs sont clairs dans sa tête mais les mots ne sont jamais assez violents. On l'encourage. L'avocate est là. Son père aussi. Son frère aussi. Mais ça ne suffit pas. C'est peut-être pire. Il a honte d'avoir à formuler des choses aussi sales. Il a honte aussi de les comprendre. De les avoir vues. D'avoir été là et de n'avoir rien fait. Mais à dix ans, est-on coupable, est-on capable ? Il se dit qu'il aurait pu mais il s'est tu.
Les mots comme du venin quittent sa bouche et lui brûlent les lèvres. Et la langue. De vipère.

Il n'apprendra jamais à oublier.
Il n'en parlera à personne.
Il bercera ses mensonges.

~

Palo Alto l'accueille alors qu'il a déjà le cœur en miettes. Confettis de sentiments noirs et blancs. Explosion de cauchemar et de chagrin. Sept mois qu'il est parti pour un autre monde avec sa voiture. Amouraché de la mort, émerveillé de ses grands bras de velours, amusé par ses baisers glacés. Ils étaient deux, il n'est plus qu'un. Qu'un avec un père fantôme. Un père morne et froid. Un père-oeuf que la mort a percé. Une coquillé encore ronde et belle mais qui ne renferme rien d'autre que du vide. Le chagrin a mangé tout ce qu'il y avait de beau, avant. Le deuil a soufflé les envies, les désirs. C'est un oeuf vide incapable de pleurer.
Lui, il s'y est fait, à cette nouvelle famille étrange qui ne lui apporte plus rien. Ou plutôt, à ce duo insensé et insensible qu'ils forment. Il comptent les jours qu'il arrive à tenir. Les bâtons s'alignent : il tient mieux qu'il ne l'aurait cru.
Il grandit avec ça. Cette coquille silencieuse qui ne l'aime ni ne le déteste. Il s'épanouit à sa manière. Il apprend à devenir un homme selon ses règles. Il attend demain avec impatience. Mais demain n'arrive jamais. C'est le même jour qui se répète.
Inlassablement.
Pris au piège.

Puis, il rencontre Samuel, le Zozio. Il fait la connaissance du soleil. Samuel dont les ailes sont de flammes. Une brûlure à l'état pur. Il sait qu'il ne peut rien espérer. Il devient son ami, l'amour caché dans le coeur. Mais Zozio l'éblouit, l'aveugle. Il scintille, il rayonne. Tous les jours, tout le temps.
Alors, il se contente de se brûler les yeux.

~

Zozio n'est pas là.
Il n'était pas là hier non plus.
On dit qu'il a explosé.
Pensées pour ses ailes. Écorchées ? Brisées ?
Pourra-t-il seulement à nouveau s'envoler ?

Il n'espère pas. C'est sa chance. C'est son temps. C'est son amour qui tire le plomb dans le creux de ses plumes blanches. C'est son désir qui arrache sa liberté. Zozio ne volera plus. Il doit rester au sol avec lui. Il en a assez de seulement se brûler les rétines. Il veut aussi se brûler la peau et les os. Zozio a toujours été trop loin. Ou trop haut. Alors il ne veut plus le voir voler, jamais.
Il est égoïste, il est cruel, il est amour.
Et le Zozio qui a explosé.

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amande / okaane / vingt&un ans / tellement nice le forum ♥