T'as ce regard méchant. On dirait une peste. T'en ai une. Mais chut. T'es là. A le regarder. Putain c'est qui ? Nan pas besoin de demander. Tu vois ta mère à peine vêtu. Mhm. Son nouveau joujou, la clope au bec. Classe. C'est ton nouveau beau-père, Millie. Sois gentille avec. Tu le regardes lui te souris. Tu lâches un petit sourire. Qu'est-ce que tu t'en fou dans un mois il va dégager. C'est comme ça, ca ne changera pas bordel. Celui avant lui, il est parti deux semaines après. A cause de toi. Il a essayer de te toucher puis il a dit que t'étais une petite allumeuse. Tu sais pas. Tu l'as gifler. Tel les grands dans les films. T'étais puissante à ce moment. Le lendemain il a quitté ta mère.
T'es une poupée, une putain de poupée, dépravée. Tu crois que t'es une hirondelle. Tu passes ta vie dehors. Tu fais ce que tu veux. On te demande rien. Des fois tu danses dans la rue avec ta bouteille dans la main et ton manteau fourrure trop grand. Bordel t'es grande avec ça, une dame. Ton rouge à lèvres qui dépasse, mal mit ca donne un côté badass. La bouche rouge vermillon, la peau blanche, les yeux trop maquillés et le mascara qui coule. Putain t'es belle comme ça. Dépravée plutôt. Provocante. Grande pourtant on dit toujours que t'es trop jeune.
T'es pas trop jeune sur Internet. T'es parfaite. Ta peau blanche, tes yeux clairs. Tes photos presque dénudés que tu postes. T'en a rien à foutre. Au moins là. Ils te disent pas que t'es trop jeune. Ils aiment ça, ils double-clic. Tu te prend pour une grande à faire des poses de mannequins. Alors qu'en fait t'es rien. Plus t'as de notifications tumblr plus t'aimes ça. T'en prend gout. Tu provoques même. Il y a cette nouvelle mode, montrer ses os, toi, t'es pas grosse. Ca t'amuses. Toute cette attention.
Quatre heures. C'est l'heure sur ton téléphone. Tes yeux piquent. Et il commence à pleuvoir. Tu jures. T'es assise sur le trotoir à fumer depuis une heure. T'as casser tes chaussures. T'es en chaussette. Tu trouves ca marrant. Dans trois heures tu dois être à l'école. De toute façon qui ça préoccupe de savoir si t'es chez toi ou pas ? Personne. Tu rentres tu vois ta mère avec sa vodka. Comme d'hab. Elle te souris et te demande comment c'était dehors. Il pleut. C'était ta réponse. C'est pas du genre à te dire t'étais où ? Il est tard ? En plus ta bu ? Ta fumer ? Tu sais que tu as quinze ans ? Non elle s'en foutait. C'était bien. T'étais libre. Mais non. La barrière de cette liberté c'est le joujou. Il te dévisage. De haut en bas. Qui lâche un 'tu as vu l'heure ?'. Tu regardes donc l'heure. Ricanes. Qu'est-ce que tu t'en fous. T'es une grande fille maintenant t'as plus dix ans.
A l'école c'est Melisandre, t'es souvent au second rang vers la fenêtre. T'écoutes. Tu prépares déjà ce que tu vas faire plus tard. Tu rêves d'être millardaire. Avoir du champagne qui coule à flot dans un yatch. Rêves encore. Tu sais très bien que ca sera jamais comme ça. Déjà petite on demandait ce que tu voulais faire plus tard : comme ma mère. On te riait au nez tu comprenais pas. Tu penses encore à cette idée. De tout façon, on te le dit. T'es comme ta mère. Son portrait. T'es la mini-elle. Tu te maquilles comme elle, tu fumes comme elle, tu bois comme elle, tu fais tout comme elle. Mais toi c'est toi, elle c'est elle. Ça n'a pas de sens. Tu te perds dans les vas et viens des pensées tout en écoutant l'enseignant parler de ce qu'a voulu dire l'auteur dans le chapitre cinq, page trente du livre, qu'est-ce qu'on s'en fou quoi. Même en sachant ça tu seras toujours Mélisandre, la fille au visage de poupée qui se prend pour une grande avec son manteau fourrure et son rouge à lèvre trop rouge.

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