Décris-nous ta relation avec tes parents : je crois qu'ils m'aiment bien.
une fois, on m'a offert un vélo pour noël. je me rappelle, j'avais sept ans, c'est à peine si j'arrivais à monter dessus. j'en voulais un rose mais celui-là était jaune alors je l'ai boudé pendant deux-trois semaines, suffisamment pour qu'il prenne la poussière. et puis un jour, j'en ai eu besoin pour aller chercher le pain, ensuite le papier toilette et aussi pour m'inscrire au collège. je l'aimais bien, finalement. sauf qu'il s'est cassé à mon huitième anniversaire. je crois qu'il a pas supporté d'avoir trois mioches sur le dos, c'était trop lourd pour lui. mais ça m'a pas paru grave sur le moment. je venais de recevoir un autre vélo, rose, avec des paillettes. l'autre, je sais pas où il s'est retrouvé. et en vrai, je m'en foutais. il était dégueu.  
notre relation, c'est ça. sauf que je peux pas rester dans un coin pendant deux semaines, à rien dire, à rien faire, à pourrir lentement. ils m'aiment bien mais je crois qu'ils me pardonneront jamais cette effronterie.
c'est mes parents, quoi.
les chromosomes, ça suffit pas comme relation ? // Comment ça se passe au lycée ? : c'est marrant le lycée.
il y a des adultes bien comme il faut, sérieux, compréhensifs parce-que-ce-sont-des-ados-on-est-tous-passé-par-là-qui-n'a-jamais-[copie, coller connerie cliché qu'on fait à quinze ans]. faut-être-patient-ha-ha-ha.
il y a les élèves, assis sur des chaises qui leur rentre dans les fesses, occupé à essayer de répondre au fameux « tu veux faire quoi plus tard ? »
rien, rien, rien du tout.
je veux continuer à embrasser tony en secret, derrière les poubelles de la cantine. je veux continuer à rire aux cochonneries de grace, à mimer une scène d'amour avec elle. je veux continuer à mater des séries nulles à la télé. à montrer ma culotte en grimpant aux arbres. à bouder parce que tony a embrassé grace. à revenir vers lui la semaine d'après parce qu'il a un scooter. à revenir vers elle parce que je l'aime quand même.
les équations du second degré ne m'aideront pas à garder tony. montesquieu ne me montrera pas comment dire « j'en peux plus » à maman. descartes ne saura pas m'expliquer pourquoi je pleure après une soirée. ou pourquoi j'ai la gorge nouée dans les bras de joeh. ou pourquoi je ferme les yeux devant le miroir de ma salle de bain.  
au lycée, on nous apprend la vie.
et apparemment la vie, c'est juste une grosse connerie de plus dans cette longue liste de conneries que l'on commence à quinze ans.