il attend.
il attend toujours.
là, adossé contre ce mur aux couleurs encre,
couleur âme,
des mots jetés du bout du coeur avec haine et amour.
la nuit arrive doucement,
les perles d'étoiles commencent à se déposer sur le soleil,
et puis,
il fait presque froid ici-bas mais lui,
il n'a pas froid,
il n'a jamais froid,
il ne craint rien.
il attend,
il attend qu'on vienne lui réclamer la belle blanche,
celle qui fait chavirer vers les astres et les galaxies,
celle qui fout la tête à l'envers.

ça m'fout en rogne qu'il me touche comme ça
de façon indécente,
en public, devant les spectateurs-fantôme.
y'a pas un chat (ou chien, on s'en fou) ici,
alors ses mains s'baladent sous mon chandail, il me tripote les seins,
mais moi j'veux pas, j'ai pas envie, j'ai pas l'alcool dans l'sang qui brouille les pistes.
j'lui dis ''arrête'', j'lui dis ''lâche-moi putain'', j'lui mors la lèvre jusqu'à ce que le fer rouge me coule dans la bouche.
et pis lui il gueule, il beugle à en réveiller les morts.
que j'suis une pute, que j'suis qu'une traînée. que j'vais finir sur le trottoir à tapiner.
lui il part et moi j'pleure à en décrocher des étoiles.
ça goûte pas bon sur mes lèvres qui sont peintes de rouge humain.
j'suis une pleureuse derrière un module de skate.
j'suis tristesse dans le parc vide (enfin, j'crois).

y'a les cris d'une fée derrière le brouillard,
ça sonne un peu amère
et c'est pas très joli à entendre,
même pour son coeur insensible.
ses yeux se baladent par ci par là
puis il la voit,
et lui aussi,
avec ses grosses mains sous ses vêtements,
elle se baladent mais elle elle crie encore,
et elle lutte un peu contre un monstre.
il s'approche doucement,
avec sa démarche renard,
cigarette dans la gueule,
les poings serrés dans les poches.

ça me fait grimacer, ce sang dans ma bouche,
ma tête qui fait mal,
mon coeur qui est tout patraque.
l'autre, il part à la dérive, dans son flot d'injures.
moi, j'pleure à m'en arracher de l'adolescence.
et plus loin, spectateur muet, un garçon à la chevelure nuit, avançant à pas de loups.
fous... l'camp...
comme ça, direct, entre deux sanglots, entre deux hoquets.
et le renard, il avance toujours, et puis ça sent la cigarette, et puis moi j'ai l'impression d'être l'océan-tempête. le visage barbouillé d'larmes et d'noir mascara. j'lève les yeux vers l'inconnu, j'ai la honte collé au regard. j'suis un peu comme un skate brisé, abandonné ici, sur le pavé.

la fumée de sa cigarette
danse, danse,
autour de lui.
d'un coup il a chaud,
il sent l'adrénaline lui grimper dans les veines.
la fée jolie se débat dans ses bras,
et lui il a juste à décoller son poing
pour calmer l'autre gars pendu à son corps,
à son visage,
à son tout.
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