elle aime trop rêver Orphée. et puis rêver c'est bien joli, mais ses rêves prennent toujours bien trop de place. alors c'est la mélancolie qui la fait danser jusque tard le soir. partenaire infaillible, confidente inébranlable, maîtresse passionnée. elle sait bien que la vie n'épargne personne les trois quarts du temps, mais même très pourrie elle cache encore de jolis moments. parfois. des petits bonheurs incohérents qu'on veut croire innocents. ceci dit c'est un peu paradoxal parce que l'innocence franchement elle s'en balance. l'humanité est pervertie, y a pas besoin d'épiloguer. alors le mot « innocence » devrait s'exiler en quatrième vitesse en Albanie, parce qu'il est rejeté et que tout le monde le déteste. on se fout juste royalement de sa gueule. elle n'a que quinze ans vous savez, mais elle a fait trop de choses déjà. elle le sait bien. elle l'assume. la connerie est un refuge assez pratique. puis elle nous emmerde pas trop, elle pose pas trop de questions. elle se contente d'être présente quand on a besoin d'elle. un peu comme une mère doit l'être, théoriquement. elle a quinze ans et elle se fait du mal, elle s'use presque pour rien. elle sait bien. elle fume trop, elle boit trop, elle va pas en cours dès que c'est possible, elle couche, elle tournoie au milieu des parkings en souriant comme une illuminée, elle oublie pourquoi elle pleure. elle s'oublie. même si c'est la solution de facilité. être lâche c'est reposant, parfois. pourtant dans sa tête y a toujours de belles roses qui éclosent et qui lui murmurent que l'espoir c'est pas un vilain mot, et qu'on peut s'autoriser à y croire une petite minute supplémentaire quand l'aube caresse la terre.