zoe elle est seule. indéniablement. inlassablement. elle mange seule. toujours. mais cette solitude, elle est choisie. c'est parce qu'elle le veut bien qu'elle ne se retrouve qu'avec sa personne heure après heure. elle dit même non aux garçons, zoe. même pour un petit film de rien du tout. elle veut pas, ne peut pas. parce qu'elle espère toujours qu'il reviendra, zoe, son paul. même si ça fait deux ans qu'il a déménagé et presque autant de temps depuis qu'il l'a oubliée. probablement. c'est dans l'ordre des choses, elle le sait. mais elle arrive pas, zoe. son coeur il arrive pas à l'oublier, il se serre dès qu'elle entend son prénom. inlassablement. et c'est atroce, mais tellement bon. elle sait, comme ça, qu'elle est toujours bien là. sur terre. en vie. elle a un gros trou dans la poitrine, c'est son impression, mais elle est là. à fouler le bitume, à regarder des films minables qui la font se sentir encore plus minable, à aller à l'école. elle ne fait que ça. sauf la nuit, c'est là qu'elle sourit. un peu. très peu. mais elle sourit quand même et c'est déjà ça. elle se sent libre. comme si elle peut être qui elle veut quand le ciel est noir. et elle l'est. parce qu'elle enlève les remparts qu'elle a monté. elle se libère. à coup de peinture. elle tague. personne ne le sait. sauf elle. et encore. c'est comme si elle oubliait tout à l'instant où son frêle corps s'étire sur son lit frais. un lit bien trop grand. dans une maison bien trop grande. parce que oui, elle fait partie de la jeunesse dorée, zoe. elle voudrait ne pas l'être, mais c'est comme ça. elle ne se plaint pas non plus, mais elle préférerait être normale. même si elle sait que la normalité, ça n'existe pas. elle voudrait juste être dans la norme. ça la tue, zoe, d'être riche. et intelligente en plus de cela. première de la classe, depuis toujours. on la cantonne à cela, à l'école. et là, ce sont eux qui l'enferment dans une image. une image qu'elle n'a pas voulue, mais qu'elle accepte. elle joue le jeu, elle est d'accord. c'est de l'argile, Zoé. elle a même dit "bien sûr" pour aider ses camarades en difficulté. le nouveau, surtout. qu'est-ce qu'elle aurait pu dire ? zoe, elle ne voyait qu'une seule réponse. parce qu'elle aime ça, aider. c'est dans sa nature. qui elle est. son essence. mais elle n'est pas parfaite, non. personne ne l'est. et elle voudrait qu'on la voie pour ses défauts, un peu. mais elle ne changera pas pour cela, elle restera comme elle est. jusqu'à ce qu'elle veuille ou le fasse naturellement. comme tout le monde. elle aimerait peindre plus tard, zoe. pour de vrai, dans la rue. du moment qu'elle peint, tout lui va. mais dans sa famille, on est pas artiste. alors elle ne le sera probablement pas. c'est comme ça. elle est un peu fataliste, la petite. sur ça tout du moins. même si d'habitude elle pense que ce qui doit arriver, arrivera. que tout arrive pour une raison, aussi. mais ça la rend triste, cette histoire. ça la fait détester ses parents, aussi. un peu. alors elle se mue dans son silence avec eux. zoe, elle n'a plus rien à leur dire. pourtant elle aimerait, oh ça oui, leur crier son amour pour la peinture. leur dire que c'est ça qu'elle aime. mais c'est un combat perdu d'avance. alors, elle ne s'exprime qu'à coup de soupirs. de petits bruitages aussi. ses yeux sont tristes, mais baissés. de toute façon, ils n'auraient pas remarqué même si elle affrontait leurs regards. zoe, elle est faible avec eux. ils ne sont pas comme elle, ses parents. mais c'est les siens. sa famille.

c'est encore un bébé, zoe.
elle traîne avec des gens qu'elle ne connaît pas. justement pour ça. elle peut être qui elle désire. et c'est ça qu'elle veut. être une page blanche. vierge. non jugée. ni étiquetée. immaculée. c'est le pied.

léa / yellowgreen / dix-neuf ans / il a l'air magique, ce forum